07/09/2021

Confection de fagots, par Résilient

 Bonjour à tous, 


Je suis l’heureux propriétaire d'une petite rivière (ou un gros ruisseau, au choix), qui a été laissée partiellement à l’abandon pendant une bonne vingtaine d’années, car pas de convention avec une association de pêche et un propriétaire qui n’a jamais entretenu.
  

L’ancien proprio avait rasé toute la ripisylve (la végétation des bords de rivière) juste avant de vendre « pour qu’c’est bien prop’ et qu’ça donne envie d’acheter». Mais bon, au bout de 3 ans, les aulnes, ça pousse bien (des recépées de 20 tiges de 5 cm de diamètre, pour 3 m de haut). Après pas mal de visites « d’experts » et de recherches sur internet, j’ai décidé de reprendre en main le bousin pour traiter toute cette végétation de bord d’eau en taille « têtard », ce qui va me permettre de faire du bois de chauffe en coupant les rejets de chaque arbre sans avoir à l’abattre. 

Je conserve donc le rejet de meilleure venue, le plus gros et le mieux fixé sur chaque souche.
La production de biomasse générée d’une ripisylve est délirante : 2 m3 de perches de bois (avec branchettes) pour une vingtaine de mètres de berge. Et des mètres de berges, j’en ai environ 400… 

Quiconque a déjà coupé des noisetières va comprendre l’ampleur du bazar : des perches pas assez grosses pour faire du bois de feu, des brindilles partout, et trop de boulot pour un broyeur (sans compter que le terrain est en pente…). 

Laisser pourrir ça sur place, comme cela m’a été suggéré, ne me convient pas : c’est crade, et voir autant de bois coupé « pour rien », ça me désole.
C’est comme ça que j’ai redécouvert le bon vieux fagot.

Nos ancêtres pas si lointains, avant l’invention de la tronçonneuse, de la fendeuse et du tracteur, ne brûlaient que rarement des bûches comme nous les connaissons aujourd’hui : un débit de tronc refendu jusqu’à obtenir des quartiers de bois manipulables. Le plus souvent, ils brûlaient des bois de petite section compressés entre eux pour obtenir ce qu’on appelait communément un fagot, ou fagotin, ou fascine. Le fagot était utilisé pour la cuisine, le four du boulanger (les « fascines de boulange »), ou comme moyen de chauffage pour ceux composés de branchages de 2 à 3cm de diamètre.
 
Confectionner du fagot à la main, c’est long et fastidieux. J’ai donc cherché si quelqu’un avait eu l’idée d’en inventer une.
Alors, ça existe, http://www.rectiligne.eu/ ou http://lafagoteuse.free.fr/?page_id=6 (médaille d’or concours Lépine 2013), mais c’est 400€ ou les fabricants ne répondent pas…J’ai donc décider d’en fabriquer une. 

Mon objectif est de fagoter des perches de moins de 5 cm de diamètre et des branchettes, dans un format permettant leur utilisation en bois de chauffage ou d’allumage, ainsi qu’une utilisation en réfection naturelle de berge par plessage (vivant ou mort). Dans ce dernier cas, le fagot sert de « filtre » en étant placé contre la face intérieure du tressage végétal constituant le mur de retenue de berge (la face extérieure étant celle du côté de l’eau) : 


Le fagot sert à éviter que les matières utilisées pour le remblaiement de l’espace compris entre le mur de plessis et la berge effondré (broyat de bois, terre…) ne passent dans les interstices du plessis. 

Donc, pour fagoter « utile », il faut un dispositif qui permette de serrer les branchages tout en les maintenant fortement pour que le fagot puisse être attaché (par un fil de fer) puis coupé à la longueur souhaitée (50 cm pour mon poêle).
Je me suis librement inspiré du grand modèle présenté dans l’Agrodoc « Outils et machines simples d'exploitation forestière » (ICI) pour en réaliser un plus petit pour la réalisation de fagotins de 50cm et du diamètre d’une bûche. 



Réalisation :


1 - Un cadre en bois pas cher (ici, du Douglas, mais n’importe quel bois fait l’affaire) : 2 sections de 6X8X80, assemblés « en échelle » avec 3 traverses de même section de 40 cm de long : une à chaque extrémité et une au centre.
2 - Marquer le centre des 2 traverses latérales et, de chaque côté, à 12-13 cm du centre, fixer des tasseaux solides de 30 à 40 cm de long. Perso, j’ai pris des sections rondes en hêtre que j’avais récupéré gratos en scierie : un simple trou dans la traverse et le barreau est fixé. Mais on peut utiliser des sections carrées, rectangulaires…peu importe. Ces 4 barreaux servent à guider les perches et les branchettes et à les maintenir alignées avant le serrage. 
3 - Dans la traverse du milieu, percer un trou au centre et y passer une corde solide (ici, de la corde de lieuse) et la bloquer par un noeud simple.
4 – Prendre ensuite une section solide de 40 cm environ que vous percerez à l’une de ses extrémités pour venir y fixer l’autre bout de la corde, avec un noeud simple.
5 – Sur une des traverses de bord du cadre, fixer deux équerres en vis-à-vis, à une distance égale à l’épaisseur de la section de la barre de serrage. Ces équerres serviront à coincer la barre de serrage, en passant un gros clou qui viendra la bloquer une fois en tension.   
 
Le bousin : 



Utilisation : 

1 - Confectionnez votre fagot avec des perches. L’idéal est d’avoir des grosses sections à l’extérieur, puis des moyennes, et enfin des brindilles au cœur du fagot. Mais, pour simplement brûler dans un poêle, un mélange de branches de tailles différentes est suffisant. Pour l’obtenir sans avoir à ébrancher les perches, je les entasse tête-bêche entre les sections verticales, ce qui permet de répartir les différents diamètres sur l’ensemble des fagots. 



2 - Une fois entassées, procédez au serrage. Des réglages seront nécessaires pour trouver la bonne longueur de corde assurant un serrage optimal, et pour déterminer le point où il faudra enfoncer une vis dans la barre de serrage pour qu’elle vienne se bloquer sur le clou. Sans cette vis, vous risquez de vous prendre la barre de serrage dans le groin. 



3 - Une fois serré, coincez la barre de serrage et liez la botte bien serrée de chaque côté, à l’intérieur du cadre. Dans mon cas, l’espacement de 40 cm me fait lier le fagot à 5 cm de chaque bord.
Conseil : placez les ficelles ou le fil de fer AVANT de serrer, car ce sera impossible après. Perso, j’utilise du fil de fer pour tendeur de grillage à poule. Quand je décendre le poêle, je les récupère et je les réutilise.     




4 – Desserrez le fagot, faites-le avancer, puis coupez-le (scie, tronçonneuse…) et recommencez l’opération jusqu’à la fin de la botte de perches.




Et voilà un fagot : 


N’essayez pas de fagoter complètement toute une longueur de perches en une seule fois pour les couper ensuite. En effet, le serrage modifie la position de chaque perche dans la botte et comme beaucoup ne sont pas droites, elles vont se détendre une fois coupées et, même si votre premier fagot sera bien serré, les suivants vont se desserrer immédiatement. 

Rendement :
Sans forcer, environ 30 fagots à l’heure. Peut être amélioré par une préparation préalable des bottes.

Qualité de feu : 

Brûle vite et fort, environ 20 minutes pour un fagot. Mais cela dépend évidemment du bois utilisé.
Les fagots peuvent être utilisés pour valoriser les branchages des coupes d’arbres jusqu’à leurs extrémités, alors que celles-ci sont généralement abandonnées en forêt lors des coupes importantes.


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