Salut à tous,
Comme pour le reste de mes chantiers, je voulais trouver une solution indépendante pour mon bois de chauffage.
La première solution qui m'était venue naturellement à l'esprit était d'exploiter intelligemment les boisements déjà présents sur mon terrain, de manière classique : abattage, coupe, fendage....
Le point positif étant que mon terrain me fournirait l'énergie nécessaire au chauffage, à la cuisine et à l'eau chaude sanitaire.
Les points négatifs étant assez nombreux :
- utilisation de machines à énergie fossile : tronçonneuse, fendeuse, tracteur...
- technique nécessitant une bonne forme physique et donc non valables pour des personnes âgées (et oui : faut y penser) ;
- mobilisation de surfaces importantes pendant des périodes très longues pour une finalité unique : la production d'énergie.
Mais c'est une autre problématique inhérente à mon terrain qui m'a progressivement amené à une autre solution pour la production de bois : le terrain est traversé sur 200m par un cours d'eau, et je suis propriétaire des 2 berges, ce qui nous fait 400m de berges à consolider, surveiller, entretenir et toussa...
C'est donc naturellement que je me suis intéressé à la ripisylve (les arbres qui poussent sur les berges), puisque ce sont ces arbres dont le réseau racinaire retient les berges des cours d'eau et qui en assurent la solidité.
Les essences principales de la ripisylve sont les différentes espèces de saules, les aulnes, le frêne, les érables sycomore et plane, l'orme champêtre... voir ici : http://www.crpf-poitou-charentes.fr/Les-essences-de-la-ripisylve.html
C'est donc tout naturellement aussi qu'à un moment, je suis tombé sur un site formidable traitant de la taille des arbres dite "en têtard" : http://missionbocage.fr/references-bibliographiques/fiches-techniques-bocage-info/
La taille en têtard a presque complètement disparu des pratiques sylvicoles et ripisylvicoles, alors que sa pratique est attestée dès le néolithique, et qu'elle a perduré jusqu'à l'avènement de l'agriculture moderne, dans les années 50. Ensuite, ce fut le massacre, et des millions de ces arbres ont été abattus, brûlés ou simplement laissés à pourrir...
Le principe est de former l'arbre en l'étêtant quand il atteint 5 cm de diamètre à une hauteur comprise entre 1.30 m et 2 m, et de couper toutes les branches restant sur le tronc. L'année suivante, l'arbre produit des rejets à partir de la tête, qu'on laissera pousser entre 3 ans (pour les aulnes) et 10 ans (pour les chênes), ce qui permet de récolter les branches tout en laissant l'arbre en place, qui "rejettera" des branches, et le cycle recommence. On peut ainsi récolter 1 stère de bois par arbre à chaque coupe, une fois l'arbre à maturité.
De fait, le têtard répond à l'ensemble de mes problématiques :
- pratiqué avec de l'aulne, du frêne et du saule en ripisylve, il permet de consolider les berges en plantant un arbre tous les 1 à 3 mètres (les têtards prennent peu de place et n'ont pas le temps de se gêner, puisqu'ils sont rabattus régulièrement). A ce compte, je peux planter presque entre 150 et 300 arbres, rien que sur les berges (soit 150 stères tous les 3 ans, une fois l'arbre à maturité).
- les branches à couper sont basses (le tronc fait 2m de haut maxi, souvent moins) et plus légère que des grumes. La manipulation est donc beaucoup plus aisée et surtout, moins dangereuse.
- l'arbre n'est pas abattu : pas d'engins, pas de perturbation de la flore, pas de replantation à faire ;
- les branches font environ 10-15 cm de diamètre (une fois l'arbre à maturité), et il n'est donc pas utile de les refendre. De plus, elles peuvent être coupées avec des moyens manuels (scie à bûches). Il n'y a donc plus de dépendance aux énergies fossiles.
- dernier point non négligeable, la durée de séchage avant utilisation : l'aulne, le saule, le noisetier et le frêne, s'ils sont coupés après la chute de sève (en hiver, donc), seront prêts à brûler à l'automne suivant, s'ils sont entreposés en piles de séchage et bien exposés au soleil. Je me chauffe partiellement à cela (et même exclusivement de septembre à novembre) et le bois flambe parfaitement sans encrasser (pas d'encrassage particulier lors du ramonage). Il faut 3 ans après abattage pour avoir du chêne brûlable et 2 ans pour du hêtre.
J'ai commencé à tailler à l'hiver 2016 les arbres déjà en place issus de recépées (une trentaine). J'en ai étêté à l'hiver 2017 (une trentaine également). J'en ai retaillé cette année (hiver 2018). L'idée est d'avoir, à maturité, 30 à 40 arbres à traiter chaque année. Et autant de stères à récupérer.
Quelques photos :
1 - Exemple d'arbre étêté cet hiver (janvier 2019) : Aulne de berge: 3,5 m rabattu à 1,5m, diamètre 6cm
2 - Aulnes étêtés l'hiver dernier (croissance d'un seul été) tronc rabattu à 1,5m, diamètre 5cm et 10 cm
3 - Aulnes étêtés à l'hiver 2017 (2 étés de croissance), rabattus à 1,5m, Diam entre 10 et 20 cm
Certains rejets font près de 3m, pour un diamètre de 3 à 5 cm, c'est-à-dire utilisable en combustible.
Ces arbres seront à nouveau ébranchés à l'hiver prochain.
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire