03/10/2015

[ Exclusivité ] Le rouleau de feu (roll fire) par Rammstein




Aujourd'hui je vous présente donc en exclusivité sur Olduvai le rouleau de feu.



Kézako ? Contrairement à ce que pourrait laisser supposer l’intitulé du fil, il ne s’agit pas d’une énième position amoureuse ! La technique présentée ci-après est à ma connaissance une première dans la sphère francophone. Les allemands l’appellent Tampon-Feuer / feu de tampon, et les anglophones fire roll / rouleau heu... de feu, terme que j'ai repris faute d'équivalent en Français.

De nombreux "experts" en survie, bushcraft et vie sauvage présentent la technique du feu par friction avec drille et archet comme étant la technique primitive ultime pour faire du feu. AMHA ils se trompent, ou sont simplement ignorants ! Avec le rouleau de feu, on oublie la drille, l’archet, la pommelle, la planchette, l'huile de coude, les ampoules, l'épuisement, les crises de nerfs, les cheveux arrachés, les cris de rage, les moments de désespoir... Le rouleau de feu est bel et bien LA technique primitive ultime pour avoir du feu RAPIDEMENT avec un minimum de ressources à disposition ! Et avant d'en faire la démonstration, un peu d'Histoire façon Franck Ferrand...

< Mode Franck Ferrand ON >

Les origiiiines de cette techniiiique sont plutôt obscuuuures. Ce qui est toutefois avéré, c’est qu’elle a été utilisée intensivement par les Frontoviks soviétiques lors de la seconde guerre mondiale. Ceux-ci l’auraient "enseignée" à leurs adversaires allemands combattant sur le front de l’Est. Après-guerre, les prisonniers allemands en détention dans les goulags soviétiques ont à leur tour repris l'astuce pour allumer leurs clopes. 


Ceci explique l'utilisation de cette technique dans la sphère survivor germanophone. Rüdiger Nehberg - un spécialiste de la survie allemand - en parle d’ailleurs dans un de ses ouvrages (d'où également l'appellation Rudiger roll dans la sphère anglophone), et je le soupçonne fortement d'avoir bénéficié des savoirs acquis par un proche ayant combattu les bolchéviques à l'Est de l'Oder-Neiße...

Les soldats russes, manquants de façon chronique de matériel, disposaient rarement d’un moyen dédié à l’ignition d’un feu (briquet, allumettes..). Ils ne manquaient pas par contre d’ingéniosité. On peut aussi légitimement penser que les soldats issus des contrées les plus reculées et les plus froides de l'Empire Soviétique ont apporté avec eux cette technique ancestrale. Les plus doués d'entre-eux étaient, paraît-il, capables de démarrer un feu en roulant du pied le tampon coincé entre la semelle de leur botte et le sol. Bref... La technique qu’ils utilisaient alors faisait intervenir un minimum de matériel :
-    2 planches rugueuses, sinon par défaut 2 objets rugueux à peu près plats (semelle de chaussure, morceau d'écorce, pierre plate, bord de route, latte de plancher d’une maison fraichement bombardée, épave de Panzer…),
-    des cendres issues d’un précédent feu de bois (ou d’une cigarette),
-    des fibres de cellulose.

Les fibres de cellulose étaient, d’après la légende, issues de la doublure ouatée de la veste molletonnée équipant chaque soldat pendant la mauvaise saison, et dénommée Telogreika / Телогрейка, un mot qu’on pourrait traduire par "chauffe-corps", comme illustré sur le document iconographique ci-dessous :



< Mode Franck Ferrand OFF >

Dans un contexte de survie, on doit évidemment se contenter de ce que l'on a sous la main : les fibres de ouate provenant du kit de premiers soins ou de la trousse de maquillage de Madame, un simple tampon hygiénique. Mais un filtre de cigarette, du PQ, un mouchoir en papier, un morceau de vêtement (t-shirt, jean), des fibres végétales (sans doute la méthode ancestrale) conviennent également. Certains sur le net s’ingénient d’ailleurs à tester cette technique avec tout ce qui leur passe sous la main : tissus divers, ficelle, fibres végétales encore vertes et humides, foin…

La recette de base fait intervenir des cendres, mais la technique fonctionne également sans. On peut aussi utiliser avec succès des particules de rouille, de la poudre de charbon, du chaga (un champignon parasite poussant sur le bouleau), du sable, et sans doute une foultitude d'autres matériaux. Je pense que ces ingrédients jouent le rôle d’accumulateurs de chaleur, jusqu'à permettre l'apparition des braises.

La technique est très simple à mettre en œuvre une fois le matériel réuni. Attention : à l'instar d'autres techniques primitives, le rouleau de feu permet seulement d'obtenir une braise. Si votre objectif est de faire un feu, il faudra également prévoir la matières première idoine pour recueillir la braise, lancer le feu et l'entretenir. Les photos qui suivent montre la technique de base la plus facile et rapide à mettre en œuvre, et fait appel à un tampon hygiénique. Quelques grammes de cendre (mélangée à du charbon de bois pilé) et 2 planches complètent l'inventaire. Comme on le constate, c'est très sommaire.



On commence par dépiauter le tampon hygiénique. Je n'utilise que la moitié du tampon, sachant que pendant l'opération il va s'allonger énormément.







On dépose sur le tampon quelques grammes de cendre :



Puis on referme le tampon aussi serré que possible :



Le boudin obtenu est roulé entre les paumes des mains, mouillées au préalable d'un peu de salive :



Le tampon est alors placé entre les 2 planches :



Selon un mouvement de translation, la planche supérieure est lentement frottée contre la planche inférieure, en prenant soin d’exercer un maximum de pression sur le boudin de fibre dans la phase de poussée. Ceci permet de bien former le boudin et de compacter les fibres de cellulose. La rugosité des surfaces fait que le boudin est en permanence en rotation. Il est très important que les fibres n'accrochent pas aux planches, sans quoi le boudin perd sa cohésion et devient impossible à rouler.



Entre-temps je déménage le matos et rentre me mettre à l'abri, car il commence à pleuvoir des trombes d'eau ! La séance photo se poursuit quelques jours plus tard en intérieur.

Après quelques mouvements, on peut augmenter la vitesse d'exécution et effectuer des va-et-vient, toujours en exerçant l'effort de pression lors de la phase de poussée. Après quelques dizaines de va-et-vient, une odeur de brûlé se fait sentir, signe qu'une ignition a eu lieu. Le boudin peut alors être extrait. Il est tout chaud et montre des signes externes de combustion : c’est bon signe, et la preuve qu’on tient le bon bout !





Le boudin est alors dépiauté lentement de façon à permettre l'apport d'oxygène. Une légère fumée s'en échappe, signe que des braises sont bel et bien présentes. Celles-ci sont avivées en soufflant précautionneusement dessus, jusqu’à l’ignition du feu !







Et voilà : Nadejda peut allumer sa papirosa !



Lors de mon tout premier essai il y a quelques années (suite au visionnage d'un reportage sur une école de survie qui enseignait la technique), en parfait débutant, j'avais ainsi obtenu du feu en moins de 5 minutes ! Magie ? Les phénomènes physiques mis en œuvre sont en fait très simples à expliquer : les fibres de cellulose sont soumises à une forte pression et à des efforts de frottement intenses, qui provoquent un dégagement de chaleur résultant en la formation d’une braise.

Les avantages de cette technique primitive par rapport à d’autres sont multiples :
-    elle nécessite très peu de matériel,
-    elle ne nécessite aucun outil tranchant ou lien quelconque,
-    elle est très simple à mettre en œuvre,
-    elle fonctionne avec une grande variété de matériaux,
-    elle peut être réalisée d’une seule main si nécessaire,
-    elle est relativement rapide,
-    elle requiert une dépense énergétique modérée,
-    ses chances de succès sont élevées,
-    elle peut être utilisée aussi bien en environnement urbain qu’en pleine nature.

Il semblerait également que la technique fonctionne avec des composants humides, les fibres séchant au cours de l’opération de roulage.

Inconvénient ? Il faut avoir des fibres de cellulose ou un quelconque équivalent sous la main, mais franchement ce n'est pas ce qui manque dans notre environnement immédiat ! Il pourrait également s’avérer intéressant d’identifier les fibres fonctionnant particulièrement bien avec cette technique : laine, cheveux humains, laine d'acier, fibres synthétiques… Pour ce qui concerne la mise en compression et en rotation du tampon, tous les objets plats, secs et rugueux conviennent. Idéalement 2 planches non poncées font parfaitement l'affaire. S'il s'avère qu'elles sont trop lisses, on peut strier leur surface avec un couteau ou tout autre objet contondant.

En guise de motivation, les 2 liens suivants renvoient vers :
- la chaîne d'un passionné testant cette technique avec tout ce qui lui tombe sous la main => https://www.youtube.com/user/boggycreekbeast/videos?shelf_id=0&view=0&sort=dd
- une démonstration de la technique en 2 minutes 30, sans outil ni cendre, avec seulement un bout d'écorce, des fibres végétales et une pierre plate => https://www.youtube.com/watch?v=n54at86f5wc

En tout état de cause, si vous maîtrisez cette technique et savez sourcer judicieusement dans votre environnement les quelques ingrédients nécessaires, vous saurez facilement gérer une pénurie d'allumettes, une perte de firesteel ou une panne de briquet !

Viel Spaß beim Reiben!

Rammstein


http://www.le-projet-olduvai.com/t9546-technique-le-rouleau-de-feu#158412 

2 commentaires:

Bien le bonsoir, merci du tuyau, je n'avais pas entendu parler de ce truc^^.

Bien le bonsoir, merci du tuyau, je n'avais pas entendu parler de ce truc^^.

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